Par un arrêt du 14 octobre 2015, le Conseil d’Etat livre une décision intéressante combinant Droit de l’urbanisme et Droit de la responsabilité administrative.

La délivrance d’un certificat d’urbanisme erronée engage la responsabilité de la commune, alors même que l’acquéreur avait imprudemment omis d’ajouter une condition suspensive relative à l’obtention du permis de construire dans l’acte de vente.

Une SCI obtient un certificat d’urbanisme positif.

Cette SCI acquiert ensuite une terrain.

La commune refuse ensuite le permis de construire.

La SCI recherche alors la responsabilité de la commune pour ce refus.

La Cour administrative d’appel de Bordeaux rejette la demande indemnitaire de la SCI : elle estime que l’imprudence de la SCI de ne pas avoir introduit une condition suspensive tenant l’obtention d’un permis de construire est totalement exonératoire.

L’approche est ici, on le voit, très subjective.

Le Conseil d’Etat prend le contre-pied de la Cour.

La décision rendue porte uniquement sur l’admission du pourvoi mais est déjà riche d’enseignements dans son abstract et son résumé.

Ainsi :

En s’abstenant de rechercher si, dans les circonstances de l’espèce, l’acquéreur avait été effectivement en mesure d’introduire une telle clause, compte tenu notamment des conditions dans lesquelles il avait pu se porter acquéreur du terrain, la cour n’a pas légalement justifié son arrêt en tant qu’il retient une imprudence de l’acquéreur. Au surplus, si une telle imprudence, à la supposer constituée, était de nature à atténuer la responsabilité de la commune, la cour ne pouvait, sans commettre une erreur de qualification juridique, lui attribuer un effet totalement exonératoire.

Par une approche davantage centrée sur l’illégalité fautive de la commune ayant instruit le permis de construire, le Conseil d’Etat s’oriente donc vers un partage de responsabilité.

Méfiance donc : l’erreur du pétitionnaire, aussi grossière soit elle, ne le prive pas d’une indemnisation.

Cette décision révèle encore tout le soin qu’il doit être apporté à l’instruction des certificats d’urbanisme, l’addition pouvant être salée en fin de procédure.


CE, 14 octobre 2015, SCI Les Colonnades : n°375538