Par un arrêt du 16 mai 2019, la Cour de Cassation précise que la classement erroné -et donc illégal- d’un chemin dans la voirie communale ne constitue pour autant pas une voie de fait.

Le juge judiciaire ne peut donc pas enjoindre à une personne publique de décider le déclassement du bien.

Rappel des faits : une commune prend un arrêté d’alignement intégrant un chemin à la voirie communale.

Un débat survient quant à la propriété du chemin.

Le juge administratif sursoit à statuer dans l’attente de la position du juge judiciaire devant se prononcer sur la propriété du chemin. Celui-ci attribue la qualification de chemin d’exploitation et décerne donc la propriété à des personnes privées.

Dans un premier raisonnement, la Cour de Cassation confirme la position tenue par la Cour :

ayant retenu à bon droit que la délibération du conseil municipal classant un chemin dans la voirie communale ne constitue pas un titre de propriété et que, en cas de revendication, il appartient à la commune de fonder son droit de propriété sur un titre ou sur la prescription acquisitive, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche que ses constations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision en retenant, sans en dénier le caractère exécutoire, que ni les délibérations successives du conseil municipal ayant notamment classé le chemin dans la catégorie des voies communales le 15 mars 1962, approuvé le tableau de classement de ces voies le29 août 1964 ou approuvé la carte communale le 24 juillet 2003, ni le plan de réorganisation foncière homologuant le plan des voies communales, devenu définitif à la suite de l’arrêté préfectoral du 2 juin 1999, ni l’arrêté d’alignement individuel du 20 mai 1999 ne constituaient des titres de propriété

Néanmoins, dans un second temps :

pour condamner, sous astreinte, la commune […] à procéder au déclassement du chemin, l’arrêt retient qu’il constitue un chemin d’exploitation qui, en l’absence de titre en attribuant la propriété exclusive aux consorts I, est présumé appartenir aux propriétaires riverains,chacun en droit soi, et est affecté à un usage commun ; Qu’en statuant ainsi, alors que, en l’absence de voie de fait, il n’appartient pas au juge judiciaire d’enjoindre à l’administration de déclasser un bien ayant fait par erreur l’objet d’une décision de classement dans la voirie communale, et qu’un tel classement, bien qu’illégal, n’est constitutif d’une voie de fait que s’il procède d’un acte manifestement insusceptible de se rattacher à l’un des pouvoirs de l’administration, la cour d’appel a violé les textes susvisés

L’on relèvera non sans sourire qu’après avoir rappelé que la Cour a méconnu la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III et le principe de la séparation des pouvoirs, la Cour de Cassation se prononce sur la légalité du classement…

La solution parait néanmoins logique : une erreur de classement ne saurait relever de la voie de fait admettant seulement les hypothèses d’extinction -sous-entendue matérielle- du droit de propriété.


C. cass. 3e, 16 mai 2019 : n°17-26210

Sur la voie de fait : TC, 17 juin 2013, Bergoend c.Société ERDF Annecy Léman : n3911