Par une décision du 17 février 2023, le Conseil d’État confirme que des troubles mentaux ne font pas obstacles à l’engagement de poursuites disciplinaires et des sanctions.

Les faits : un agent régional a adressé à de très nombreuses reprises, tant à l’oral qu’à l’écrit, des ordres comminatoires ainsi que des propos extrêmement déplacés, agressifs et dégradants, dont plusieurs ayant un caractère sexuel et comportant des menaces physiques, à l’une de ses collègues de la maison de la région, à l’une de ses supérieures hiérarchiques et à une élue de la région.

Des plaintes pour harcèlement moral sont déposées. L’intéressé soutient que son état de santé mentale le rendait irresponsable de ses actes. L’agent est révoqué (après une première procédure initiée en 2008).

On sait déjà qu’une sanction disciplinaire doit tenir compte de l’état psychologique ou psychiatrique de l’agent. Ainsi :

compte tenu de l’état de santé de M. A…, de nature à altérer son discernement, l’autorité disciplinaire, qui disposait d’un éventail de sanctions de nature et de portée différentes, a, en faisant le choix de la révocation qui met définitivement fin à la qualité de fonctionnaire, prononcé à l’encontre de M. A… une sanction hors de proportion avec les fautes commises.

CE, 9e – 10e ch. réunies, 15 oct. 2020, n° 438488.

Pour autant, l’état psychologique ou psychiatrique de l’agent n’écarte pas toute sanction. Il est jugé :

l’état mental de la requérante n’était pas de nature à faire obstacle à ce qu’elle fut regardée comme responsable de ses actes ni à ce que, par suite, une sanction disciplinaire put être légalement prise contre elle 

CE, sect., 15 oct. 1971, n° 75258, Lebon. ; CE, 5 / 3 ss-sect. réunies, 21 janv. 1994, n° 104718.

Ici, le Conseil d’État ne déroge pas à la ligne qu’il s’était fixé et juge :

eu égard à la gravité des faits reprochés, lesquels sont au demeurant survenus alors que la région avait donné en 2014 à M. D la possibilité de reprendre une activité professionnelle au sein de la fonction publique territoriale en décidant de ne pas mettre en œuvre la première sanction de révocation prise en 2008, et compte tenu de ce que l’état de santé mentale de M. D n’était pas de nature à altérer son discernement au moment des faits en cause, l’autorité disciplinaire n’a pas, en l’espèce, pris une sanction disproportionnée en décidant de prononcer la révocation de l’intéressé.

Aussi, une révocation – soit la sanction la plus lourde – est possible, même lorsque l’agent souffre de troubles psychiques lourds. Pour autant, ces troubles doivent être pris en considération pour déterminer la sanction. Autrement dit, des faits identiques ne seront pas sanctionnés de la même manière si, dans l’un des cas, l’agent souffre de troubles psychiques.


CE, 6-5 chr, 17 févr. 2023, n° 450852, Lebon T.