Par une décision du 10 juin 2021, le Conseil d’État juge que le RGPD est applicable aux mesures de publication individuelle visant les agents de la fonction publique.
En cela, le règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 – le RGPD, donc- est opposable à la publication en ligne d’un arrêté de nomination d’agents publics comportant le nom et la date de naissance des intéressés ainsi que l’indication du fondement juridique de la nomination.
Les faits : un agent bénéficie d’un recrutement à raison de son handicap, dans le cadre du décret du 25 août 1995 relatif au recrutement des travailleurs handicapés dans la fonction publique.
Son arrêté de nomination diffusé, il demande la suppression de certaines mentions, dont celle relative à son handicap.
Pour censurer le Tribunal administratif qui avait rejeté la requête de l’agent, le Conseil d’État raisonne en deux temps :
Si la mise en ligne d’une telle information révèle indirectement que les personnes recrutées à ce titre souffrent d’un handicap, elle ne donne directement aucune information sur la nature ou la gravité de ce handicap et ne saurait, par suite, être regardée comme procédant au traitement d’une donnée relative à la santé des personnes considérées. Toutefois, le maintien permanent sur le site internet du ministère de ces données personnelles excède ce qui est nécessaire au regard des finalités du traitement en cause, qui vise à garantir les droits des tiers et le respect du principe d’égal accès aux emplois publics énoncé à l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Il appartient ainsi à l’autorité compétente, saisie d’une demande en ce sens, une fois expiré le délai de recours contre un tel acte, de prendre des mesures de nature à limiter le traitement des données en cause à ce qui est nécessaire, en ne maintenant cette publication que sous la forme d’un extrait ne mentionnant pas le fondement juridique de l’arrêté de nomination. En l’espèce, à la date de la présente décision, le délai de recours est expiré et le maintien de la mise en ligne des informations révélant indirectement le handicap du requérant excède ce qui est nécessaire au regard des finalités du traitement.
Le Conseil d’État se livre donc à un contrôle de proportionnalité entre la nécessaire information des tiers et la finalité du traitement.
L’État est ainsi tenu de prendre toute mesure pour que la mention du recrutement de l’intéressé au regard de son statut de travailleur handicapé ne figure plus sur la version de l’arrêté de nomination mise en ligne.
La jurisprudence étant rétroactive, cela permet d’anticiper un beau contentieux en cascade dès lors que l’arrêté de nomination est un peu bavard sur les données à caractère personnel : agents de toutes les fonctions publiques, unissez-vous !
CE, 10 juin 2021, M. A…-C… c. ministre de l’économie, des finances et de la relance : n° 431875