Par une décision du 4 octobre 2024, le Conseil constitutionnel a fait taire l’article L. 532-4 du code général de la fonction publique, qui ne prévoyait pas l’obligation d’informer le fonctionnaire faisant l’objet d’une procédure disciplinaire de son droit de se garder le silence.

Dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité, le requérant estimait que l’absence d’information sur le droit de se taire portait atteinte aux droits de la défense. Pour rappel, ce droit, autrement appelé droit de garder le silence, est un principe fondamental qui trouve d’abord son application dans le droit pénal. Le principe a essaimé et ce droit est désormais reconnu dans d’autres procédures, par exemple devant l’Autorité de la concurrence ou l’Autorité des marchés financiers.

Ça va mieux en le disant

Le Conseil constitutionnel a étendu le champ d’application de ce droit aux sanctions disciplinaires ayant le caractère d’une punition et a ainsi donné raison au requérant en ces termes :

En ne prévoyant pas que le fonctionnaire à l’encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée doit être informé de son droit de se taire, les dispositions contestées méconnaissent les exigences de l’article 9 de la Déclaration de 1789

Les conséquences sont multiples. Dorénavant, l’administration devra informer explicitement le fonctionnaire de son droit de se taire avant toute audition, notamment devant le conseil de discipline. Cette obligation vise à éviter que les déclarations de l’agent ne soient utilisées contre lui par l’autorité de sanction. De plus, la tenue du dossier de l’agent devra être (encore) plus rigoureuse et tenir compte de l’exercice de ce droit avant toute poursuite. Enfin, l’administration devra entretenir une culture de la preuve et tenir, par exemple, un registre des communications relatives aux droits des fonctionnaires pour limiter les contestations ultérieures.

Parole Parole : l’abrogation attendra 2025

Toutefois, le Conseil constitutionnel a reporté l’abrogation des dispositions censurées au 1ᵉʳ octobre 2025, afin d’éviter des conséquences excessives. Ce délai permettra au législateur d’adopter de nouvelles dispositions conformes à la Constitution. En attendant, les fonctionnaires poursuivis disciplinairement devront être informés de leur droit de se taire dès la publication de cette décision.

Et pour tempérer Talleyrand qui soutenait que « La parole a été donnée à l’homme pour déguiser sa pensée« , les fonctionnaires pourront préférer La Rochefoucauld qui observait que « Le silence est le parti le plus sûr pour celui qui se défie de soi-même« .


Cons. const. 4 oct. 2024, n° 2024-1105 QPC